Proposer une vision synoptique et intégratrice de ces interactions
L’objectif in-fine de cet axe est de mettre en œuvre des modèles numériques qui permettent de fournir une vision synoptique et intégratrice de l’écosystème marin et de la dispersion des contaminants le long des côtes tunisiennes et méditerranéenne. L’objectif est aussi de réaliser des scénarii types afin de mieux comprendre et de mettre en évidence les interactions pouvant exister entre contaminants et écosystèmes marins à petite, moyenne et grande échelle et selon un gradient bassin versant – côte -large. Les questions qui seront abordées dans le cadre de cet objectif sont les suivantes :
- Quelle est la dispersion des contaminants en fonction des forçages physiques (atmosphère, hydrodynamisme, dynamique sédimentaire) ?
- Quels est l’impact des évènements extrêmes (tempête, crues…) sur la dispersion des contaminants ?
- Quelle est la durée de persistance de la contamination en fonction de la circulation hydrodynamique et hydro-sédimentaire ?
- Quelle est l'impact de la contamination et des forçages physiques sur la qualité des eaux ?
- Quel est l’impact de la contamination sur la distribution des communautés trophique, notamment planctonique ? Constitue-t-elle une barrière chimique ?
- Comment se réalise le transfert des contaminants au sein du réseau trophiques
- Quels sont les changements structuraux et fonctionnels induit par la contamination et en quoi, la contamination modifie-t-elle le fonctionnement global de l’écosystème?
Pour répondre à ses différentes questions, nous adopterons une approche par modélisation qui couplera hydrodynamisme et biologie et biogéochimie. Ceci sera réalisé en plusieurs étapes nécessaires pour construire ce modèle couplé.
Modèles tridimensionnels hydrodynamiques
Des modèles tridimensionnels hydrodynamiques réalistes de la zone littorale et côtière des côtes tunisiennes et des échanges côte-large seront mis en œuvre. Il sera indispensable de reproduire la variabilité saisonnière et interannuelle de cette circulation. Ainsi, ces modèles devront prendre en compte tous les forçages influençant la circulation modélisée. En fonction de l’échelle des phénomènes décrits et de la position géographique, ces forçages pourront être : la stratification, le vent, la marée, les flux de chaleur et la houle. Pour affiner les résultats à différentes échelles, il sera important de prévoir la possibilité d’emboîter ces différents modèles.
De plus, nous utiliserons les résultats issus des campagnes antérieures et futures pour valider nos modèles et améliorer notre description du milieu. Pour améliorer notre compréhension des phénomènes, le modèle grande-échelle fera appel à des données satellitaires qui sont celles offrant les plus longues séries temporelles. Cela permettra d’appréhender les variabilités saisonnière et éventuellement interannuelle de certains paramètres comme la température de surface, l’élévation de la surface de la mer, etc.
La circulation hydrodynamique engendrée par des évènements extrêmes tels que les tempêtes sera étudiée par une approche stochastique et semi-paramétrique qui, à partir de ces données de grille, permet de simuler des tempêtes, i.e. des événements plus intenses que ceux présents dans les données (Chailan et al., 2017). Ce travail sera réalisé en collaboration avec l’Institut Montpellierain Alexander Grothendiek et avec l’unité de recherche INRA Biostatistique et Processus Spatiaux à Avignon
Modèle biogéochimique couplé
La mise en œuvre d’un modèle bio-géochimique prendra en compte à la fois les processus dynamiques de la circulation et les bases de l’activité biologiques. Les impacts des dépôts atmosphériques des poussières sahariennes devront aussi être pris en compte notamment dans le Golfe de Gabes qui borde la côte nord-africaine largement considérée comme la plus grande source de poussière de la Terre. Une fois conceptualisé et construit, ce modèle sera couplé au modèle tridimensionnel hydrodynamique. A l’instar de ce qui a pu se faire dans le golfe du Lion, les données disponibles et les produits dérivés des images satellitaires (chlorophylle) serviront, entre autres, à la calibration/validation de ces modèles couplés.
Modèles de transfert trophiques
Des modèles de transferts trophiques seront développés dans les hots spots de pollution et dans des zones de références. Cette approche permettra de mettre en évidence les principales voies de transfert trophique dans des milieux fortement impactés par la pollution chimique et organique, puis d’y inclure les processus de transfert et d’accumulation des contaminants dans les biotes clés et les compartiments géochimiques. Un intérêt sera porté sur le plancton surtout l’ultraplancton afin de comprendre comment ces communautés interagissent avec les contaminants et comment elles contribuent à la bioaccumulation des contaminants dans les réseaux trophiques. Ces modèles trophiques seront également couplés aux modèles tridimensionnels biogéochimiques
Modèles de transport
Le développement de modèles de transport de particules vivantes (eg ICHTYOP) prenant en compte les différents forçages (température, salinité, contaminant, hydrodynamique, turbulence …), mais aussi le comportement des organismes (migration verticale, nage…)permettra d’évaluer l’impact des contaminants sur la distribution des communautés planctoniques.Un modèle hydro-sédimentaire le long du littoral tunisien sera développé pour analyser la transformation et la dispersion des contaminants par le sédiment. Ce modèle hydro-sédimentaire pourra s’appuyer sur les travaux réalisés par HSM et INSTM dans le cadre du programme RYSCMED visant à caractériser les apports continentaux (d’un point de vue qualitatif et quantitatif) de la Medjerba principal fleuve tunisien dont l’embouchure est située dans le Golfe de Tunis tout en intégrant les apports possibles de contaminants via les eaux souterraines qui peuvent représenter une source non négligeable de polluants chimiques.
Outre l’aspect intégratif, ce travail de modélisation permettra :
- D’aider à la planification des campagnes et à l’analyse des résultats en offrant la possibilité d’avoir une vision synoptique des données
- D’effectuer des scénarii sur les effets d’aménagement ou du changement climatique pour prédire les risques de la contamination et évaluer l’état de santé de l’écosystème. Ces scenarii
- De proposer des indicateurs écologiques appropriés pour chaque écosystème étudié et efficaces (résilience, organisation, maturité, stabilité, recyclage, efficacité de transfert,…) De même que les scenarii (cf ci-dessus), ces indicateurs peuvent être proposés comme des outils d’aide à la décision pour les gestionnaires en lien avec l'objectif 3 du LMI
Les objectifs de cet axe de recherche sont très ambitieux. Toutes ces activités ne pourront pas être réalisées sur tout le littoral et les côtes tunisiennes à l’échelle de la phase 2 du LMI. Le critère de succès sera de développer et de coupler les modèles, puis d’atteindre un critère de qualité qui puisse permettre de les diffuser au sein des différents instituts tunisiens et en faire des modèles de référence tunisiens. Pour cela, nous concentrerons notre travail de modélisation principalement sur le golfe de Gabès et la lagune de Bizerte.