Objectif 1

Interactions entre contaminants et écosystèmes marins

La phase I du LMI a permis d’obtenir une panoplie de données sur les niveaux de contaminations chimiques et biologiques et leurs impacts environnementaux dans différents écosystèmes côtiers tunisiens (Baie-Lagune de Bizerte, Baie de Tunis, Golfe de Gabès). Ces acquis fourniront des bases pour la rédaction d’un livre blanc qui exposera l’état des lieux des écosystèmes côtiers et sera très utile pour les gestionnaires de l’environnement.

Lors de la phase II, les interactions entre contaminants et écosystèmes marins seront appréhendées de sorte à répondre à cinq principaux défis.

Interactions contaminants et premiers maillons trophiques

L’effet des contaminants sur les premiers maillons des réseaux trophiques (organismes planctoniques) a été démontré dans plusieurs écosystèmes méditerranéens. Toutefois, très peu de données existent à ce jour sur le lien entre la biodisponibilité des contaminants, qui dépend fortement de leur état de complexation avec la matière organique dissoute (MOD) naturelle, et leur impact sur le biota. Or, la connaissance du caractère biodisponible des contaminants est essentielle pour évaluer et prédire leur impact sur l’environnement marin. Le degré de biodisponibilité des contaminants, ainsi que l’influence des facteurs abiotiques sur cette dernière, seront donc évalués lors de la phase II. Certains organismes planctoniques sont des bioindicateurs de la pollution et pourront être donc considéré comme des outils de biosurveillance et de diagnostic précoce de l’état du milieu.

En outre, évaluer les effets et l’accumulation des contaminants dans le plancton pose de réels challenges méthodologiques et nécessite le concours de plusieurs disciplines de la chimie et de la biologie. Un intérêt sera porté à la toute petite fraction du plancton (pico- et ultra-phytoplancton), afin de comprendre comment ces communautés interagissent avec les contaminants et comment elles contribuent à leur bioaccumulation dans les réseaux trophiques. Cette action sera menée au cours la campagne océanographique MERITE-HIPPOCAMPE 2019 (cadre INSU-MISTRALS-AT « Pollution et Contaminants »), qui concerne l’étude de la contamination chimique à la base des réseaux trophiques pélagiques (plancton) via une approche transméditerranéenne Nord-Sud, et dans laquelle plusieurs partenaires du LMI sont impliqués.

Dispersion/transport des contaminants

Il est important de déterminer le devenir des contaminants dans les écosystèmes côtiers et particulièrement dans les hots spots de pollution chimique (comme le golfe de Gabès, la lagune de Bizerte, ….). Cela nécessite l’étude de la dispersion et du transport des contaminants en fonction des différents forçages physiques. Une description des traits majeurs de la dynamique côtière dans le golfe de Gabès à partir de données lagrangiennes (bouées dérivantes) et eulériennes (ADCP) et une étude de la répartition des communautés planctoniques forcée par l’hydrodynamique et le degré de pollution ont été d’ores et déjà amorcées dans le cadre de la campagne MERITE Gabès 2017 (regroupant INSTM, FSB, FSS, CBS et MIO).Ces données permettront d’alimenter/valider les modèles de dispersion et de transport des contaminants des particules et du plancton couplés à un modèle de circulation côtière et de mieux apprécier les relations entre contamination et habitats planctoniques.

Transfert des contaminants dans les réseaux trophiques

Les impacts des contaminants sur les populations et les communautés marines ont été bien décrits (phase I), alors que peu de données existent sur leurs effets à l’échelle fonctionnelle (i.e. les processus et les activités). Ce point sera donc mieux développé pendant la phase II. Les résultats seront d’une grande importance puisque les changements structuraux et fonctionnels induits par les contaminants seront intégrés dans des modèles de transferts trophiques (objectif 3), ce qui permettra de mettre en évidence les principales voies de transfert trophique dans des milieux fortement impacté par la pollution.

Cette action s’inscrit notamment dans le cadre du projet national GAMMA (2016-2019), coordonné par l’INSTM,  et menée dans le cadre d’une collaboration entre l’INSTM et la FSB. De même HSM et l’INSTM ont développé une méthodologie d’étude de carottes sédimentaires dans les zones pré-estuariennes, qui permet de retracer l’historique des apports solides au cours des dernières décennies, et la possibilité de quantifier les contaminants associés. Cette méthodologie sera développée sur d’autres sites en coordination avec les partenaires du LMI, et le contenu des carottes pourra faire l’objet d’études approfondies, notamment sur l’origine des argiles, sur le contenu en contaminants.

Interactions atmosphère-écosystème marin

Les dépôts atmosphériques (aérosols ou poussières sahariennes) dans les écosystèmes marins sont des sources importantes d’azote et de phosphore mais aussi de contaminants comme les ETMs et les HAPs. Ces apports sont des phénomènes pulsés très fréquents dont l’impact sur les écosystèmes marins en Méditerranée est bien avéré mais non encore entièrement quantifié. L’étude de l’impact des apports atmosphériques sur les communautés planctoniques (bactério-, phyto- et microzoo-plancton) a été déjà amorcée lors de la phase I dans le cadre de deux actions transverses (AéroBiz et AéroSfax) menées dans la Lagune-Baie de Bizerte et le Golfe de Gabès, qui bordent la côte nord-africaine largement considérée comme la plus grande source de poussière pour la Méditerranée.

D’ailleurs, ces poussières ont une portée très large et touchent les côtes nord de la Méditerranée. L’importance des apports atmosphériques sera évaluée à une échelle transméditerranéenne lors de la campagne MERITE-HIPPOCAMPE 2019 (transversalité CHARMEX – MERMEX dans l’AT « Pollution et Contaminants » de MISTRALS). Par ailleurs, des systèmes de collecte de dépôts atmosphériques seront installés dans différentes stations dans le golfe de Gabès pour évaluer la variabilité temporelle de ces apports.

La réponse du plancton a des évènements forts et sporadiques de dépôts atmosphériques a été souvent étudiée en conditions expérimentales contrôlées les plus proches possibles des conditions naturelles tels que les mésocosmes mais rarement in-situ. L’observation in-situ et à haute fréquence (spatiale et temporelle) à l’échelle individuelle des cellules en utilisant la cytométrie en flux à haute fréquence permettra d’étudier la dynamique de l’impact de ces phénomènes sur le phytoplancton, de quantifier cet impact en termes de production, de biomasse et de réponse sélective à de tels changements environnementaux.

Contaminants émergents

La progression de nos connaissances sur les contaminants émergents (les microplastiques, les produits pharmaceutiques,…). Le projet Claim (H2020-BG7) dans lequel deux partenaires du LMI sont impliqués (MIO et INSTM) est un excellent support pour avancer dans cet axe de recherche. L’étude de la répartition spatiale et de la caractérisation des microplastiques dans les eaux de surface et le sédiment a déjà commencé dans le golfe de Gabès dans le cadre de la campagne MERITE 2017. Développer de méthodes d’analyse (chromatographiques, optiques) de ces contaminants émergents et leur répartition (dissous-solide) sera aussi un challenge pour la phase II. HSM dispose également de compétences dans l’analyse de résidus médicamenteux qui seront conjuguées à celles des partenaires du LMI.

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